Re-construction d'un système «Digimatic», première partie...


Réalisation ... ou ... re-construction ... ou ... ré-interprétation ... ou ... "nouvelle" conception d'un ancien équipement ?


La plupart des réalisations et réparations décrites sur ce site sont destinées au projet d'expo musée quand il verra le jour.

Dans ce projet, il y aura bien sur une partie consacrée aux radios libres avec reconstitution de plusieurs studios typiques, à différentes époques.
Avec évidemment, leurs matériels et accessoires techniques...
Pas mal d'objets d'époque, authentiques artefacts, ont été découverts ces dernières années (tables de mixage, émetteurs, accessoires, décoration de studios...). C'est donc faisable !

Dans ces radios, l'imagination fut immense, tant sur le plan animation que technique : ce fut une époque de grande créativité.

Ces radios ont fonctionné essentiellement avec du personnel bénévole (pour la plupart des stations), et un gros problème qu'elles ont connu fut de "meubler" les horaires de nuit. Il s'agissait d'avoir une présence sur les ondes 24h/24, qui ne soit pas seulement la porteuse FM de l'émetteur, mais bien un programme musical.

Des animateurs auraient pu venir la nuit, mais avec des bénévoles (qui par ailleurs avaient d'autres activités), ce ne fut pas facile à mettre en place.
Une autre solution possible pour avoir de la musique continue : l'usage de magnétophones à bandes, tournant à faible vitesse... mais encore fallait-il préparer les bandes, et y consacrer énormément de temps ! Et si les mêmes bandes étaient utilisées (trop) souvent, il y avait un côté répétitif qui ne pouvait pas échapper à l'auditeur.
Il a aussi existé des systèmes de changeurs automatiques de cassettes, tels ces Philips N2408, mais c'était des usines à gaz sur le plan mécanique, et pas très fiables dans le temps. De plus, ici aussi une succession de cassettes (même changées tous les jours) aurait eu un côté répétitif puisque les différentes plages musicales sont toujours lues dans le même ordre.

A Verviers, il a existé de 1983 à 1989 une radio libre nommée REV, pour Radio Entité Verviétoise. Comme bien d'autres, cette station a démarré modestement, puis s'est équipée avec un excellent studio en 1985.
En charge de la partie technique de cette station, Jean Schreiden (ON5JS) était un électronicien particulièrement doué.

La problématique des émissions ou programmes de nuit fut aussi, bien sur, présente dans cette radio. Monsieur Schreiden chercha une solution technique pour remédier à ce problème.
Et il trouva la solution : une réalisation d'avant-garde pour l'époque, et qui fut nommée "Digimatic".


installation Digimatic

En 1986, le Compact Disc (CD) existait déjà mais n'était pas encore fort utilisé, ni très répandu.

Ce fut pourtant ce support audio qui fut utilisé pour réaliser le Digimatic !

8 ou 9 lecteurs CD, 2 decks cassettes, et une unité de commande conçue par monsieur Schreiden constituaient le système.

installation Digimatic

Il fallait bien sur des appareils pouvant être modifiés pour être pilotés par une électronique externe. Les lecteurs CD ne posent pas de souci, puisque leurs commandes sont totalement électroniques.  Mais pour les decks K7, il en fallait avec commandes électroniques et servo-mécanismes. Cela existait bien sur déjà à l'époque...

Voici une autre photo du système (ce n'est pas un souci de numérisation, la photo argentique a été faite avec un effet de doublé comme cela !)

Evidemment il ne fallait pas lire les CD en totalité les uns après les autres, car cela aurait été comme avec des cassettes, créant la répétition des plages. Ainsi fait, les CD utilisés auraient pu également être reconnus par les auditeurs...

Et c'est la que le Digimatic fut sacrément bien pensé !

Les cassettes ici ne servent que pour la lecture de "jingles", messages ou publicités (les graveurs de CD n'existant pas encore).

Les CD ne sont pas lus d'une traite, mais bien comme suit : une plage du premier lecteur puis une plage du second lecteur et ainsi de suite. Quand le dernier lecteur à fini la lecture on revient au premier, mais avec la plage suivante de celui-ci ! Et ainsi de suite.

Donc, pour changer le programme de chaque nuit, il suffisait de changer quelques CD et d'inverser d'autres dans les lecteurs. Cela ne prenait que quelques minutes pour préparer des heures de programmation.
Avec 8 lecteurs CD, on savait ainsi faire un programme de plus de 8 heures - selon la durée totale des disques placés dans les lecteurs. Et de toutes façons, tel que réalisé, même si la durée d'utilisation était supérieure à celle de l'ensemble des disques, il est peu probable que l'auditeur se serait rendu compte de la répétition, après tant d'heures....
Le système pouvait aussi être démarré sur n'importe quel lecteur (il y avait un bouton de commande par lecteur sur l'unité de commande).
Si un lecteur ne démarrait pas, le système passait automatiquement au suivant après quelques secondes.
Et enfin, il était aussi possible de changer de disque, ou même en pré-écouter un (via la prise casque) pendant le fonctionnement du système - tant que le lecteur en manipulation n'était pas celui qui était en lecture à ce moment-là.
Seul le lecteur qui était commandé en lecture fournissait un signal musical vers la sortie du système, les autres étant "déconnectés" côté audio.

Les lecteurs de K7 étaient lancés, selon leur ordre de connexion au système, toutes les X plages musicales.

Mais ... "quelle complication !" où "quel tas de ferraille pour faire cela !", pourrait-on penser en 2020 !

Ceci fait bien sur partie d'une époque révolue, et particulièrement sur le plan technique, c'est évident.
Aujourd'hui, avec un simple PC portable on peut faire un tel système très simplement. C'est absolument vrai.

Mais en 1986 - 87 ?
Dans ces années-là, on commençait seulement à trouver des ordinateurs "grand public" équipés de disques durs ! Et ceux-ci n'auraient contenu au mieux que quelques minutes de musique sur la totalité de ces disques - qui avaient une capacité de quelques dizaines de Mo !
De plus, ces ordinateurs étaient dépourvus de sorties audio de qualité, et auraient été bien en peine de restituer des fichiers audio de manière correcte avec si peu de mémoire et des processeurs tournant à quelques MHz...
Les rares ordinateurs équipés de sorties audio étaient juste bons à restituer les petites musiques des jeux vidéos avec une qualité audio assez faible.
Last but not least, un disque dur coûtait une vraie fortune en 1986.

Etablir des programmes musicaux avec un ordinateur était donc totalement impensable à l'époque.

Quand aux lecteurs à multiples CD, ils n'existaient tout simplement pas encore.

Ce système fut donc réllement quelque chose d'innovant, et d'une grande inventivité.

installation Digimatic

Ci-contre, Jean Schreiden avec son système. On voit ici 8 lecteurs CD empilés. Au milieu de la table, c'est le rack contenant l'électronique de synchronisation, et à l'avant-plan les deux decks K7 dont on ne voit qu'une partie.

Hélas cette photo est de très petite taille (publiée dans une revue radio amateur), pas retrouvé l'original.

installation Digimatic

Ci-contre, encore une autre photo, vers 1987.

Toutes ces photos permettent de se faire une idée de l'aspect extérieur de la réalisation mais pas vraiment du fonctionnement de l'électronique telle que conçue.

Seulement voila...

installation Digimatic

Si ce système fut réalisé au départ pour la radio de Verviers, son concepteur eut l'idée de le commercialiser. Soit pour d'autres stations de radios, soit pour d'autres usages ou de la musique continue est souhaitée : magasins, hôtels,...

Car Monsieur Schreiden n'était pas "seulement" le technicien de la radio libre, il vivait aussi de l'électronique avec notamment un excellent commerce de radio-télévision.

Voici une publicité d'époque, vers 1987, destinée à faire connaître le système.

installation Digimatic

Et pour le commercialiser, il valait mieux protéger l'invention.... donc de breveter le concept !
Le brevet fut demandé en 1987 et accordé en 1989 (voir ci-contre).

Cela étant su, il a été assez facile de retrouver le brevet (pris au départ pour 6 ans mais périmé depuis 1992) sur Internet !

Avec ce document, il va être possible de comprendre la conception électronique d'époque, même s'il ne contient pas les schémas complets...

Oh ! De telles recherches et études pour un si vieux système, totalement périmé de nos jours ?

Et surtout, en refaire un ? C'est quoi cette dinguerie ?

La démarche initiée ici n'est bien sur pas de refaire un tel système pour être utilisé au quotidien, c'est pour illustrer cette créativité (écrite plus haut dans cette page) qui  fut de mise à l'époque, ou plein de choses de ce type étaient à inventer.
Un tel sytème, fonctionnel, aura sa place dans le projet d'expo musée. Les lecteurs liront des CD gravés qui contiendront chacun des tout petits extraits audio, ainsi le système changera de lecteur CD après quelques secondes seulement, pour démonstration de la fonctionnalité.

Voila pour le contexte.

Plusieurs années de recherche d'un tel système (d'où qu'il provienne) ont abouti à un résultat nul : pas moyen d'en retrouver un complet !

Mise à jour du 12 juillet 2020, voir ci-dessous !

Il est impossible de savoir si, finalement, il en fut vendu plusieurs ou non... et si oui, à qui ?
Et puis, tant de temps à passé depuis la fin de la plupart des radios libres... Au crépuscule des années 80, elles ont disparu quasi totalement, ou ont été reprises dans des réseaux existants.
Ce genre de système n'avait plus d'utilité dans les réseaux de radios, ou des émissions de nuit existaient avec des animateurs pro.

De plus, les lecteurs multi-CD sont apparus au début des années 90 : soit avec deux tiroirs ou encore un grand tiroir permettant de placer 5CD.
Un peu plus tard, des "juke-boxes" à 20, 50 ou même 100 CD ont été mis sur le marché.
Ces nouvelles machines étaient capables de lire aléatoirement les différentes plages des différents disques, et auront donc pu remplacer un système Digimatic avec bien moins de matériel et donc d'investissement.
Le point d'avance qu'avait un système Digimatic par rapport aux lecteurs multi-CD qui sont apparus après, est que si un lecteur tombait hors service (panne, disque mauvais,...), le système continuait à fonctionner. Seule une panne de l'unité de commande mettait tout le système à l'arrêt, mais il s'agissait d'électronique "statique" (sans pièces mécaniques en mouvement), et pouvant être construite "surdimensionnée". Avec un lecteur multi-CD, plus de musique du tout en cas de panne ou de "raté à la lecture" de celui-ci !

Sachant tout cela, il est donc fort probable que le(s) système(s) Digimatic ayant existé ai(en)t tout simplement été "ferraillés" (jetés, détruits, démontés...) lors du démantèlement des studios de ces radios libres, quand elles ont disparu...
Car si le reste du matériel de ces studios représentait encore une certaine valeur commerciale en revente (platines, table de mixage, émetteurs...), ce genre de systèmes particuliers n'ont certainement pas trouvé amateur (excepté peut-être les lecteurs CD et decks K7). Mais l'unité de commande était un gros boîtier  "rack" sans plus d'intérêt. La technique évolue vite...
D'ailleurs, plusieurs lecteurs CD modifiés (provenant du Digimatic de REV) étaient encore présents chez Jean Schreiden après son décès, mais le système de commande lui-même n'existait déjà plus.

Dès lors, en retrouver un (ne fut-ce que le rack de commande) semble bien être "mission impossible" - sauf énorme surprise !

Mise à jour du 12 juillet 2020 : la surprise eut lieu 3 semaines après l'écriture de cette page !

En effet, l'ami Georges a retrouvé l'ensemble des platines ayant constitué un Digimatic, au fin fond d'un carton contenant d'autres "brols et machins" !
Tout ceci fut récupéré par un radio-amateur, ami de monsieur Schreiden, sans doute après la disparition de la radio qui l'a utilisé...
L'appareil fut démonté, pour récupération du boîtier "rack", du transfo, des connecteurs...
Heureusement l'électronique a été conservée, rangée... puis a changé de mains... puis encore remisée et oubliée pendant des années, et enfin retrouvée !
Merci Georges !

installation Digimatic

Le contenu d'un rack Digimatic.

Les modules individuels sont ici au nombre de 14, il y a une longue carte à connecteurs (qui fut sciée en plusieurs morceaux...) pour les modules. A droite, la carte d'alimentation, une carte avec des ajustables et enfin le vu-mètre. Ce dernier est un ancien kit Velleman basé sur des UAA170.

installation Digimatic

Les cartes enfichées sur le circuit de fond, telles qu'elles l'ont été lors de l'usage de cet appareil.

Ces modules individuels (un par lecteur) sont assez complexes, et réalisées en technologie "années 60-70" avec un grand nombre de composants discrets. Ce n'est bien sur pas une critique, le concepteur a utilisé la technique qu'il maîtrisait le mieux.

installation Digimatic

Une des cartes individuelles (module).

Que de monde, la dessus ! Pas moins de 5 relais, 5 transistors, 2 amplis opérationnels, 6 potentiomètres ajustables, et 11 condensateurs électrolytiques ! Plus des diodes, résistances et petits condensateurs en nombre...

installation Digimatic

Le circuit de fond côté connexions. On peut voir, sur la gauche du circuit, les mentions "DIGIMATIC" et "BREVETE".

Malheureusement, lors du démontage, l'ensemble de l'importante filerie interne a été coupée et il ne sera pas facile de reconstituer cela à l'identique. D'autant que la connectique audio et de commande des lecteurs est absente...

Ces photos prouvent en tout cas ce qui est écrit plus haut : ces systèmes ont probablement tous été "ferraillés", et c'est une chance d'avoir retrouvé ceci, tant d'années après...
Il restera l'inconnue sur la connectique utilisée, la disposition interne dans le rack,...

Le souhait étant de pouvoir en montrer un, si possible fonctionnel, eh bien ! On se met au boulot... et à partir des photos, des quelques explications du brevet et de l'analyse des modules retrouvés en juillet 2020 : le projet est donc d'en reconstruire un !

Evidemment, cela ne se réalise pas en un jour.

Toshiba XR-30

Il faut déjà retrouver les appareils de lecture CD et K7 qui furent utilisés à l'époque.

Les lecteurs CD ont pu être identifiés par un ami via un forum "hi-fi vintage", ce sont des Toshiba XR-30.

Cela n'est certes pas les appareils les plus courants qui soient. Ils ont été construits en 1986 / 87 et peut-être encore plus tard.

Mais début 2021, les 8 lecteurs nécessaires étaient la, trouvés principalement par un site d'enchères bien connu. Ils proviennent d'un peu partout : Allemagne (3), Angleterre (1), Belgique (1), Hollande (1), Lituanie (1), Suisse (1) !

A partir du moment ou ces lecteurs sont retrouvés, il est possible de penser à une reconstitution !

Toshiba XR-30

A noter que ces lecteurs sont particulièrement solides : parmi ceux retrouvés, un seul avait un petit souci mécanique (ouverture du tiroir à CD) qui fut très simple à solutionner.
Il a suffi de remettre en place la pièce d'entraînement blanche, (à droite du tiroir) et la refixer sur son axe...
La documentation technique de ces lecteurs CD est téléchargeable à partir de cette page.

JVC TD-X401

Les decks K7 furent bien plus difficiles à identifier à partir des photos. Ce sont des JVC, bien sur des années 86-87, avec le compartiment cassette à droite, ce qui est peu habituel. Le modèle TD-X401 ressemble assez à ce qu'on devine sur les photos mais ce n'est pas exactement le bon modèle.
Cependant, les TD-X401ont les fonctionnalités attendues, et ressemblent très fort aux originaux : ils feront l'affaire...
La documentation technique de ces decks K7 est téléchargeable à partir de cette page.

Autant les lecteurs CD que les decks K7 furent modifiés pour pouvoir être pilotés à distance.

Hélas, aucun lecteur d'époque (et ayant servi sur un tel montage) n'ayant pu être retrouvé, ici aussi il faudra inventer et recréer un peu.
Il est assez facile de réaliser la modification (qui consiste à se "repiquer" sur des boutons de commande existants), mais il est impossible de savoir comment c'était, physiquement, connecté au rack principal (type de fiches, ordonnancement de câblage,...).
Un ami ayant travaillé un peu avec M. Schreiden à l'époque a aussi quelques souvenirs. Il faudra partir de la : les documentations d'alors ayant disparu également.

L'essentiel étant de recréer quasi totalement un système fonctionnel, puisqu'aucun système original complet n'a pu être retrouvé, ce sont des détails de peu d'importance. Ce serait bien sur différent si un authentique avait été retrouvé et pu être remis en état. Dans le cas d'une restauration, les détails (même le type de fiches de connexion) sont importants. Mais en reconstruction / reconstitution et sans avoir des masses de détails...

Il y avait donc 3 commandes partant du contrôleur du Digimatic vers les lecteurs CD ou K7 (voir analyse ci-dessous) :

  • Commande "play" (CD ou K7)
  • Commande "pause" (si CD) ou "stop" (si K7)
  • Commande "skip" (si CD) ou "rewind" (si K7)

Un connecteur à 4 contacts pourra donc être utilisé : un pour le pôle commun et un par fonction.

La périphérie (lecteurs CD et K7) étant identifiée et quasiment reconstituée, il faut alors s'intéresser au rack de base.

D'abord sur le plan de l'aspect extérieur : il devra être le plus ressemblant possible à l'original.
Les photos sont trop petites pour voir les détails, car re-photographiées à partir d'albums photos dans lesquels elles sont collées, puis recouvertes d'un film plastique, collé lui aussi par-dessus les photos... Il était impossible de les numériser autrement.
Mais en se remémorant le type de matériel qu'on trouvait à l'époque (boutons-poussoirs lumineux, racks,...) il est possible de retrouver du similaire, avec de la patience et pas mal de recherches.

Ensuite sur le plan électronique : refaire plus ou moins à l'identique d'après les quelques indications du brevet (qui ne comporte que des schémas explicatifs et non détaillés), ou bien repenser la chose ?

Première étape : analyser et bien comprendre...

installation Digimatic

La figure 1 ci-contre montre un des modules (il y en a un par lecteur CD ou K7) quand ce dernier est en fonctionnement.

Le point O est connecté au point O' du module suivant, pour la synchronisation. Le point O du dernier module est connecté au point O' du premier module.

Le bouton poussoir P permet d'initialiser le module. Il y a un bouton par module permettant de lancer la lecture sur n'importe quel lecteur. Ceci envoie une impulsion sur le comparateur OP qui bascule et enclenche le relais RL1.

Pendant la lecture, les sorties audio L et R sont connectés vers la sortie du montage par les contacts du relais RL1. Les potentiomètres PL et PR permettent d'ajuster les niveaux entre les différents lecteurs qui auraient des niveaux de sortie fort différents. En même temps, les signaux audio (sommés par les résistances R4 et R5) vont vers l'ampli opérationnel nommé AMPL. Celui-ci est un comparateur, et tant qu'il y a du signal audio, sa sortie est active au niveau haut : cela charge C1 et maintient le comparateur OP basculé, qui active le relais RL1. Le condensateur C2 se charge par R6.

Si le signal audio disparaît, la sortie de AMPL tombe à zéro : le condensateur C1 va se décharger par R1 (la diode en sortie de AMPL empêche ce condensateur de se décharger via la sortie de l'ampli opérationnel). Quand la tension aux bornes de C1 est suffisamment faible, le comparateur OP bascule et désactive RL1. La constante de temps C1/R1 détermine la temporisation entre la fin de détection de signal audio et le basculement. Les sorties audio sont alors déconnectées, la LED s'éteint.
C2 se décharge dans RL2, RL3 et RL4 qui s'activent un bref instant.
C3 va se charger par la décharge de C2 puis se décharger par R7. La diode D1 empêche ce C2 de se décharger dans les relais, et via D2 l'impulsion de démarrage va être transmise au module suivant (via la connexion entre la sortie O et l'entrée O' du module suivant). R7 permet de calibrer l'impulsion transmise entre les modules.
Comme les relais RL2, RL3 et RL4 vont basculer un bref instant (décharge de C2), ils vont être utilisés pour la commande des lecteurs :

  • RL2 envoie le signal STOP au lecteur qui était en cours
  • RL3 envoie le signal PLAY au lecteur dont les sorties sont connectées au module suivant (lecteur +1)
  • RL4 envoie le signal SKIP au lecteur précédent dans l'ordre de connexion. Si un lecteur de cassettes est utilisé, RL4 est connecté à la fonction de rembobinage de la bande.

Si pour une raison quelconque le lecteur ayant reçu la commande "start" ne démarre pas, ou ne fournit pas de signal audio, la sortie de AMPL ne donne pas de signal. C1 (qui s'était chargé par l'impulsion donnée par le module précédent) va se décharger dans R1 et donner la commutation vers le lecteur suivant comme décrit ci-dessus.

Donc même en cas de panne d'un lecteur, le système n'est pas bloqué et continue à fonctionner.

installation Digimatic

La figure 2 ci-contre montre un module en attente.

Le relais RL1 est inactif : C2 s'est déchargé dans les relais RL2, RL3 et RL4 ; la LED est éteinte et les sorties audio sont déconnectées.

Quand le module est inactif, la sortie du comparateur AMPL est mise à la masse par le contact de RL1. Ceci évite que ce module ne s'enclenche si le lecteur connecté sur ce module est mis en service par exemple pour une pré-écoute. Seule une impulsion du bouton poussoir ou une impulsion provenant de l'entrée O' permet de mettre ce module en fonction.

Ce système de détection du signal audio fonctionne mais est à éviter avec de la musique comportant des pauses ou moments de niveau audio très faible. Il n'est donc pas adapté à (par exemple) de la musique classique. Le texte du brevet fait état de ce fait et c'est le seul inconvénient du système.

Il manque bien sur pas mal de composants sur ces schémas. C'est surtout incomplet autour de AMPL : le signal audio n'y était pas injecté directement mais après un filtre passe bande (autour des 1700Hz apparemment) et très certainement suivi d'un redresseur et intégrateur. Il manque également la circuiterie autour de la seconde entrée de AMPL. Il devait aussi y avoir un circuit de contrôle automatique de gain en sortie audio. Et encore certainement une "astuce" technique pour que le fonctionnement ne soit pas perturbé si on pousse sur un autre bouton poussoir pendant le fonctionnement...

Donc, d'après ces infos et les relevés sur les platines retrouvées, cet appareil était totalement bâti sur des amplificateurs opérationnels et des relais.


Le choix des lecteurs CD Toshiba n'est pas si évident à comprendre, car à l'époque plein de constructeurs plus "connus" en construisaient aussi.
Mais une raison est compréhensible une fois le fonctionnement du module de commande analysé.
En effet, beaucoup de lecteurs CD (même d'époque) sont munis d'un bouton qui a double fonction : "play" et "pause" ou "play" et "replay" (comme le Philips CD-650, même année).
Ici, ces lecteurs XR-30 ont deux boutons séparés pour ces fonctions, il y a un bouton "play" (le très large du desssus) et un bouton "pause", indépendants.

Un autre avantage de ces lecteurs : lorsque la dernière plage a été lue, si on actionne le bouton "up", il repart sur la première plage du disque (nombre d'autres lecteurs stoppent après la lecture de la dernière plage). C'est évidemment intéressant pour une lecture continue, une fois la dernière plage du dernier disque lue, tout le processus peut reprendre au début ! Cela permet un fonctionnement totalement ininterrompu du système.

Il y avait sans doute d'autres modèles disponibles à la même époque avec ces fonctions, donc le choix des Toshiba XR-30 restera un mystère.
Mais une chose est intéressante pour la reconstitution : ce sont des machines très solides, et ceux qu'on peux encore trouver sont encore en état de fonctionner, ou réparables aisément.

Maintenant que la fonction est décrite, et les appareils trouvés, il n'y a plus qu'à repenser une électronique de commande.

  • Soit totalement analogique comme la solution d'origine
  • Soit un mélange d'analogique et de circuits intégrés logiques dans l'esprit d'époque
  • Soit un minimum d'analogique, plus un processeur et du software... plus moderne et un peu anachronique, même pour une reconstruction.

Ceci étant une reconstitution d'une électronique ancienne, ce sera sans doute une solution analogique + circuits logiques avec interrupteurs CMOS (genre 4016, 4053...) pour les commutations audio.
Ces circuits CMOS ont été utilisés dans d'autres réalisations telles le commutateur audio hi-fi ou le sélecteur audio / zoneur.
Ils sont moins onéreux, moins bruyants et plus compacts que des relais électromécaniques.
Pour l'envoi des commandes vers les lecteurs CD, il sera fait usage d'opto-coupleurs.
Tout cela a été étudié entre juillet et novembre 2020, les pages suivantes décrivent la réalisation qui a duré jusque février 2021.

La réalisation de ceci demandant de rassembler pas mal de matériel, c'est donc un projet qui va être réalisé en plusieurs mois.

La seconde page relate les choix techniques et la modification des lecteurs CD & K7.

La troisième page décrit l'électronique de commande.

La quatrième page est le "gros morceau" avec la réalisation du rack de base de ce «Digimatic MKII».


Sources de documentations:

  • Album photos prêté par Madame Schreiden (via Francis Dubois) le 07/10/2018
  • Page Facebook des anciens de REV consultée le 15/02/2018
  • Site internet de l'Office Européen des Brevets (moteur de recherche) consulté le 11/05/2020
  • Echanges E-Mail avec Eric Freyens en avril 2020
  • Bulletin du GDV (Gang De Verviers - groupe de radioamateurs), année 2007, N°2.
  • Analyse des modules retrouvés en juillet 2020 pour compréhension du système.

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